Septième homélie sur la foi
1. Revenons à parler de la grâce de l’économie de l’humanité de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, et voyons ce que nous transmirent nos bienheureux dans la rédaction du symbole de foi. Voici, en effet, trois jours que je m’entretiens de ce sujet avec votre Charité et que nous faisons effort pour que vous appreniez peu à peu, afin d’en garder le souvenir, ce qui vous a été dit. Mettons-nous donc aujourd’hui aussi à vous parler de ce qui a trait à la suite de ce qui fut dit. Aussitôt en effet qu’ils se mirent à parler de l’économie, nos pères bienheureux indiquèrent en premier lieu pour qui fut réalisée une telle économie, en disant « Pour nous, hommes ». Mais ils ajoutèrent aussi « Et à cause de notre salut », — pour qu’il fût connu que c’est là le but de l’économie, — puis encore ceci : « Qui est descendu des cieux », afin de faire comprendre l’humilité sans borne (du Fils de Dieu) dans sa condescendance envers nous, et comme s’ils disaient le mot du bienheureux Paul : « Pour vous, il s’est fait pauvre, lui riche » [1], lui qui du sommet de sa dignité et d’une telle grandeur s’est abaissé jusqu’à notre infirmité. Et pour nous apprendre comment il descendit, « il devint homme », dirent-ils. Et ce ne fut pas par une simple providence qu’il s’abaissa, ni par le don d’un secours puissant comme il fit maintes fois, et encore maintenant ; mais c’est notre nature même qu’il assuma et dont il se revêtit et en qui il fut et habita, afin, par la passion, de la rendre parfaite, et c’est à elle qu’il s’unit.
(Nos pères dirent cela) pour faire connaître par là le don de sa grâce que l’on voit envers le genre humain, d’avoir assumé, (issu) de nous, un homme, et qu’en lui il fût et habitât. Ils nous enseignèrent qu’il souffrit et subit tout selon la loi de la nature humaine, afin que nous comprenions que ce ne fut pas à la façon d’un simulacre qu’il fut homme, mais qu’en vérité il fut homme et, conformément à la nature humaine, subit ce qui est humain. Mais, de peur d’allonger leur discours, (les pères) laissèrent toutes ces choses que l’une après l’autre il réalisa et que nous pouvons par la lecture de l’Évangile apprendre exactement ; et à bon droit ils usèrent de brèves paroles, en disant : « Qui est né de la Vierge Marie et fut crucifié au temps de Ponce Pilate », afin d’inclure toute l’économie en son commencement et son achèvement. Nous nous souvenons, en effet, d’avoir dit à votre Charité que c’est une règle des Écritures d’indiquer par la mention de la Croix toute l’économie du Christ, parce que par la croix il vint à la mort ; or, c’est par la mort qu’il abolit la mort et présenta manifestement la vie nouvelle, immortelle et immuable.
Ainsi donc nos pères bienheureux, bien qu’incluant en ces termes toute l’économie, comprirent cependant qu’ils devaient prendre garde à ce qu’ils disaient de la passion ou de ce qui arriva lors de la passion, parce que cela dépasse toute conception humaine. De peur, en effet, que la grandeur de ce qui arriva à la passion d’induise les auditeurs en doute au sujet même de la passion et qu’ils ne s’imaginent qu’elle n’eût lieu qu’en apparence, ils durent prendre garder à leur discours afin que l’on crût que, oui, en vérité, il mourut, (et) pour indiquer que la mort humaine et toutes les passions ont été abolies en la résurrection de Jésus-Christ. Car si lui, le Christ, a subi la mort de la crucifixion pour cette raison, — de donner à tous une certitude évidente de sa mort et, avec sa mort, aussi de sa résurrection, en laquelle fut abolie la mort, — c’est à bon droit que nos pères bienheureux nous mirent d’abord en éveil au sujet de sa mort et qu’ensuite, ils nous enseignèrent sa résurrection.
2. C’est pourquoi, après avoir dit « qui fut crucifié au temps de Ponce-Pilate », ils ajoutèrent « qui fut mis au tombeau », afin d’enseigner que ce ne fut pas en apparence seulement et en simulacre qu’il est mort, mais qu’en vérité il est mort de mort humaine, attendu qu’après sa mort, son corps fut aussi mis au tombeau selon la loi de la nature humaine. En quoi d’ailleurs ils suivirent l’enseignement du bienheureux Paul, quand il parlait aux Corinthiens de la résurrection d’entre les morts — à cause de laquelle il rappela la résurrection du Christ notre Seigneur, parce que la (résurrection) générale est assurée par celle du Christ. D’abord, touchant sa mort il enseigne que le Christ est mort, et en vérité mort : car c’est après qu’aura été reconnue sa mort, que seront acceptées les paroles qui proclament sa résurrection. Il dit en effet : « Je vous ai transmis d’abord ce que j’avais reçu : que le Christ est mort pour nos péchés, comme disent les Écritures, et fut enseveli » [2]. Or ce n’est pas sans intention qu’il emploie cette addition « il fut enseveli », mais pour prouver qu’en vérité, selon la loi des hommes, il est mort et a subi la mort comme il convient à une nature mortelle.
3. De cette même manière, nos pères bienheureux aussi ¬— après avoir dit : « il a été crucifié au temps de Ponce-Pilate », pour enseigner qu’il mourut —, ajoutèrent cet « il fut enseveli », afin, selon la prédication de l’Apôtre, d’enseigner qu’en vérité il est mort. Et de même qu’après avoir dit : « il fut enseveli », et avoir enseigné qu’en vérité il mourut, le bienheureux Paul ajouta : « Il est ressuscité dans les trois jours, comme l’avaient dit les Écritures » [3] — car de cette manière aussi il pouvait enseigner la résurrection du Christ après sa mort, pour affermir dans l’âme des auditeurs une foi véritable en sa mort — de même nos pères bienheureux aussi, après avoir dit : « Il fut enseveli », ajoutèrent « et dans les trois jours il est ressuscité, comme l’avaient dit les Écritures » : c’est la parole même de l’Écriture, exactement, dont ils se servirent pour nous transmettre la profession (de foi) en la résurrection.
4. Car elle n’est pas négligeable non plus la parole qui promet la résurrection : pour ceux qui ne croient pas, elle est danger de mort et de déchéance de tous biens, mais à ceux qui croient, elle procure la confiance ; à toutes les merveilles opérées dans l’économie du Christ, c’est la résurrection ; et l’affaire capitale parmi tous les redressements qu’il a opérés est celle-ci, par quoi fut détruite la mort et dissoute la corruption, disparurent les passions, se dissipa la mutabilité, s’éteignirent les mouvements de péché, fut anéantie la puissance de Satan et détruite la violence des démons, surpassée l’angoisse de la Loi. À cela (s’ajoute) la promesse d’une vie immortelle et immuable par laquelle sera détruit et anéanti tout cela, parce que c’est par cela même que les démons avaient entrée pour combattre contre nous.
5. Aussi le bienheureux Paul dit-il : « Si les morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus n’est pas ressuscité ; mais si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est notre prédication, vaine aussi votre foi » [4]. S’il n’est pas possible en effet que ressuscitent les morts, il est évident que le Christ non plus n’est pas ressuscité, car lui aussi, par le corps, était de la même nature et c’est selon la loi de la nature qu’il reçut la mort. Mais si nous confessons que le Christ est ressuscité, il est évidemment certain qu’il y a en vérité une résurrection, car ce qui n’aurait pas pu être, en lui n’aurait pas non plus été. Mais si en lui elle eut lieu et se réalisa, il est évident et certain qu’elle peut avoir lieu. Il ne nous convient donc pas de nier la résurrection comme impossible, mais nécessairement il nous faut faire profession (de foi) en elle, puisqu’une fois elle a eu lieu et a pris son commencement dans le Christ notre Seigneur. Or celui qui nie la résurrection générale, anéantit aussi la résurrection du Christ, puisque lui aussi par sa chair fit partie de la nature commune ; et qui anéantit celle-ci prouve que « superflue est notre prédication et vaine aussi notre foi. » Car, puisque le bien capital de toute l’économie du Christ dans un corps est la résurrection — qui détruit tous les maux et est l’introduction à tous les biens —, quiconque anéantit la résurrection rend vaine notre prédication et aussi votre foi. Si la mort n’est pas détruite, l’emprise des maux subsiste, et donc, quant aux biens, nous n’en attendons (plus) aucun. Il est évident que si la résurrection n’avait pas eu lieu, la mort serait la maîtresse et son empire non aboli. Mais par la mort, le péché aussi a son emprise et tous les maux restent autour de nous. « Si les morts ne ressuscitent pas, dit l’Apôtre, le Christ non plus n’est pas ressuscité ; et si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est votre foi : vous êtes encore dans vos péchés » [5], indiquant (ainsi) que c’est par la résurrection que fut détruite la mort, et par la mort le péché. Car c’est après la résurrection que nous serons immortels et immuables ; mais, que ce ne soit pas la résurrection, vaine est la foi, règne encore la mort et le péché avec elle. « Et vous aussi, vous êtes encore en vos péchés », et il n’y a pour vous (nul) espoir de biens ; (espoir) qui est par la résurrection, nous vous l’avons prêché.
6. C’est donc à bon droit que nos pères bienheureux, selon la parole de l’Apôtre, comme bien capital de l’économie du Christ, dirent en premier lieu : « Il est ressuscité d’entre les morts », et ajoutèrent ensuite : « Il est monté aux cieux ». C’est ainsi, en effet, qu’il nous fallait aussi, après avoir appris qu’il est ressuscité d’entre les morts, savoir où il est après sa résurrection. De même, en effet, que le Livre Saint dit d’Adam que Dieu le fit, et ajouta comment et d’où, et en quel lieu il le plaça pour mener cette vie ; ainsi du Christ notre Seigneur aussi — qui de nous fut assumé et fut selon notre nature à nous —, après avoir dit qu’il « ressuscita d’entre les morts », à bon droit ajoutèrent-ils : « Il est monté aux cieux », afin que nous apprenions qu’il fut transféré en une nature immortelle et (qu’il) est monté aux cieux, car il convenait qu’il fût au-dessus de tout.
7. Or, tous les évangélistes nous racontèrent la résurrection d’entre les morts et c’est elle qu’ils mirent comme conclusion à leurs évangiles, sachant qu’il nous suffit d’apprendre qu’il est ressuscité d’entre les morts et fut transféré à une vie immortelle et immuable et qu’il nous a donné l’espoir de lui être associés en ces biens à venir. Mais le bienheureux Luc, qui lui aussi est un rédacteur de l’évangile, ajouta : « Il est monté aux cieux » [6], afin que nous sachions où il est depuis sa résurrection. Il est évident qu’en écrivant dans les Actes des Apôtres, c’est ceci que dès le début de sa rédaction il nous apprit ; et ensuite il ajouta le reste successivement, selon l’ordre usuel du discours. Car, puisque ce ne fut pas seulement par sa résurrection que le Christ fut pour nous prémices, mais aussi par son ascension aux cieux, et qu’en toutes deux il nous associa à sa grâce, c’était donc pour nous une juste convenance de les apprendre toutes deux, car ce que nous attendons ce n’est pas seulement de ressusciter d’entre les morts, mais aussi de monter au ciel pour être là avec le Christ notre Seigneur.
8. Ainsi le bienheureux Paul dit aussi : « Notre Seigneur lui-même au commandement, à la voix de l’archange et au son de la trompette divine, descendra du ciel ; et ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront en premier lieu, puis nous, laissés en arrière, avec eux nous serons ravis sur les nuées dans les airs à la rencontre de notre Seigneur, et ainsi tout le temps nous serons avec notre Seigneur » [7]. De même, dans un autre passage aussi, il dit : « Notre service à nous est dans les cieux d’où nous attendons comme vivificateur notre Seigneur Jésus-Christ, qui transformera notre corps d’humiliation et le rendra semblable au corps de sa gloire » [8], pour montrer que c’est au ciel que nous serons conduits, d’où viendra le Christ notre Seigneur qui nous transformera par la résurrection d’entre les morts et nous fera monter au ciel pour être tout le temps avec lui. Et encore : « Nous savons que si notre maison terrestre est détruite, nous avons cependant un édifice qui est de Dieu et une maison non faite de mains d’hommes, dans le ciel pour toujours » [9], nous enseignant que par la résurrection nous deviendrons immortels et vivrons au ciel.
9. Et un peu après, il dit encore : « Aussi longtemps que nous sommes dans le corps, nous sommes éloignés de notre Seigneur, car c’est dans la foi que nous marchons et non dans la vision ; mais avec assurance nous attendons de sortir du corps et d’être avec le Christ » [10] ; enseignant ceci, que tant que nous sommes dans ce corps mortel, nous sommes comme des passants, éloignés de notre Seigneur, parce que nous ne jouissons pas encore effectivement des biens à venir. Car ce n’est que par la foi que nous les avons reçus, et néanmoins nous avons une grande assurance sur ce qui doit advenir ; et avec beaucoup de soin nous attendons ce moment, où nous dépouillerons et rejetterons (loin) de nous la mortalité de ce corps, deviendrons immortels et immuables par la résurrection d’entre les morts et serons ensuite avec notre Seigneur comme des gens qui, depuis beaucoup de temps et de depuis la longue durée de ce monde-ci, étions éloignés et attendions de nous joindre à lui. Aussi (l’Apôtre) dit-il : « La Jérusalem d’en haut est libre, qui est notre mère à tous » [11]. Or ce qu’il nomme la Jérusalem d’en haut, c’est la demeure du ciel, où, par la résurrection d’entre les morts, nous naîtrons et deviendrons immortels et immuables, en vérité jouissant de la liberté dans la vraie joie, aucune violence ne nous affligeant plus, ni non plus de tristesse ne nous arrivant ; mais (où) nous serons dans des béatitudes ineffables et des délices qui n’auront pas de fin.
Puis nous attendons de jouir de ces biens, dont eut les prémices le Christ notre Seigneur — lui dont se revêtit Dieu le Verbe et qui par la conjonction exacte mérita pour soi un tel honneur, et à nous aussi accorda l’espoir de lui être associés —, c’est donc à bon droit que l’Écriture Sainte aussi nous apprend que non seulement il ressuscita d’entre les morts, mais aussi qu’il monta au ciel ; en sorte qu’à nous aussi il convient d’espérer cela même, comme nos pères bienheureux après avoir dit : « Il ressuscité dans les trois jours » ajoutèrent « Il est monté au ciel ».
10. Mais ils joignirent aussi ceci à leur discours « Il est assis à la droite de Dieu » : premièrement pour indiquer l’immense honneur que cet homme assumé reçut de sa communion avec Dieu le Verbe, qui s’en revêtit ; et deuxièmement, afin que nous comprenions en quels biens nous serons si vraiment nous avons société avec lui. Car le bienheureux Paul ayant dit : « Vous aussi qui étiez morts par vos péchés et vos fautes, Dieu vous a rendu la vie par le Christ » ajouta : « par la grâce vous vivez, et il vous a ressuscités et fait asseoir dans les cieux, en Jésus-Christ » [12], pour nous indiquer la grandeur de l’association que nous aurons avec lui.
11. Après avoir établi ceci, nos pères ajoutèrent à bon droit : « Et il reviendra juger les vivants et les morts », pour nous apprendre son second avènement, où de nouveau nous recevrons association avec lui ; en vérité, « l’attendant du ciel », selon la parole de l’Apôtre, « pour nous faire à la ressemblance de sa gloire ». Or ils ajoutèrent à sa venue ce « pour juger les morts et les vivants », afin d’établir en nous, avec le souvenir des biens opérés envers nous, la crainte aussi, et nous préparer au glorieux bienfait d’une telle économie. « Les morts et les vivants » dirent-ils : non que des morts soient jugés — car quel jugement ferait-on à des morts qui n’ont plus conscience ? — mais, c’est qu’au moment où il viendra, tous, il nous ressuscitera ; ceux qui furent depuis Adam, tous les hommes trépassés, il les transformera en nature immortelle ; et ces hommes que la résurrection saisira vivants, il les transformera seulement et de mortels les fera immortels. Aussi dirent-ils : « les vivants et les morts ». Ils appelèrent « vivants » ceux qui auront été laissés à ce temps-là, « morts » ceux qui étaient (déjà) morts et trépassés, pour nous apprendre que tous les hommes seront jugés et qu’il n’y aura personne qui échappe à la discrimination pour recevoir, une fois jugés, la rétribution que méritent leurs actions — certains les biens, d’autres les maux. Et tous seront discriminés et jugés d’après ce que leur volonté aura choisi.
12. C’est ce que dit aussi le bienheureux Paul dans sa lettre aux Corinthiens : « Nous ne nous endormirons pas tous, mais tous nous serons transformés. Brusquement, en effet, en un clin d’œil, au son de la dernière trompette, les morts ressusciteront incorruptibles, et nous, nous serons transformés » [13] ; enseignant ceci — quand il dit « que tous nous ne mourrons pas, mais tous nous serons transformés » —, (que) les morts ressusciteront incorruptibles et immortels, (que) les vivants seront transformés en une nature immortelle, et les deux choses se feront en un clin d’œil. Car il dit ce « nous serons transformés » de ceux qui seront (encore) vivants, comme lui-même, écrivant cela de son vivant, prenait sur soi le personnage des vivants. Ainsi écrivit-il encore aux Thessaloniciens : « Nous qui sommes restés, nous ne devancerons pas ceux qui se seront endormis, parce que notre Seigneur lui-même, au commandement, à la voix de l’archange et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront d’abord, et ensuite nous, qui vivons, nous serons ravis avec eux sur les nuées dans les airs, à la rencontre de notre Seigneur et toujours nous serons avec notre Seigneur » [14]. Or il dit que c’est avec toute la rapidité d’un clin d’œil que tout cela se réalisera. Que les vivants ne dépasseront pas les morts en sortant à la rencontre de notre Seigneur, cela nous indique que ceux-ci ressusciteront, et que ceux-là seront transformés ; et les deux chœurs seront ravis à la rencontre de notre Seigneur.
13. Voilà donc ce que dirent nos bienheureux pères pour nous mettre en garde, nous faire craindre et nous préparer au jugement futur. Et à bon droit ce fut de la personne de l’homme assumé pour nous qu’ils dirent la parole « pour juger les vivants et les morts », afin de nous indiquer quelle dignité aura le Temple de Dieu le Verbe — c’est-à-dire cet homme qui fut assumé pour notre salut —, et d’affermir en nous la crainte en nous enseignant dans leur discours le jugement futur. Il sera donc très dur pour nous, si nous avons une volonté mauvaise et dépravée.
Celui-là, qui, (issu) de nous, fut assumé et qui est en une telle dignité qu’il jugera les vivants et les morts, parce qu’il a été fait libre de tout péché et pouvait à cause de sa dignité échapper à la mort — car il dit : « Je puis déposer mon âme et je puis la reprendre » [15], pour indiquer qu’il est seigneur et maître de mourir et de ne pas mourir —, il accepta donc la mort qui lui survint par violence ; et, en l’assurance qu’il avait, il faut capable de la vaincre et procura à tout le genre humain aussi l’abolition de la mort. Si donc, (issu) de nous et de notre race, il est homme et supérieur à la mort à cause de son extrême glorification — et étant absolument sans tache par la vertu de l’Esprit Saint, il reçut sur soi mort et passion, mais mort ignominieuse par la croix, afin de nous donner à nous de jouir des biens à venir —, il est contraire à toute justice que nous le méprisions, lui qui a subi de telles choses pour nous, et que nous ne persévérions pas en son amour. Conduisons-nous en conséquence selon la loi de ses commandements et honorons son amour et sa miséricorde plus que tout : voilà ce qu’il nous faut montrer pour les bienfaits ineffables qui par lui découlent sur nous.
14. Considère donc l’exactitude de leur discours puisque, traitant de son humanité, de ses souffrances et de sa résurrection, ils dirent du même personnage, que c’est lui qui doit faire le jugement, afin que nul ne doute que c’est un homme qui doit être le juge de toute la création. Ils ajoutèrent « encore », pour indiquer, comme par un signe, la divinité du (Fils) Unique qui est en lui, de laquelle il lui échoit de recevoir une telle dignité. Si en effet ce n’eût été ceci qu’ils voulaient indiquer, il leur eût suffi de dire : « qui viendra juger les vivants et les morts » ; mais par cette addition de « encore », ils signalèrent sa divinité. Car celui qui vient, manifestement, c’est cet homme en vérité, qui fut assumé de nous ; lui qui viendra du ciel, et c’est de lui qu’à bon droit il est dit qu’il se déplace d’un lieu à un autre — comme il fut dit : « Ce Jésus qui d’entre vous fut emporté (au ciel), viendra ainsi comme vous l’avez vu monter au ciel » [16], pour indiquer évidemment que celui qui leur apparaît, qui est avec eux et maintenant s’en sépare, celui-là de nouveau viendra, vu par tous les hommes.
Mais pour cet homme-là cet « encore » ne vaut pas : ce ne fut pas lui qui vint, mais (ce fut) la divinité (qui) vint du ciel. Ce ne fut pas par un déplacement d’un lieu à un autre, mais par une condescendance et une providence que, par celui-là, homme assumé pour nous, elle exerça à notre égard. C’est elle qui, « encore » dans le monde à venir, viendra en ce même homme que pour nous elle assuma. Donc, l’homme qui pour nous fut assumé, maintenant pour la première fois est élevé au ciel ; et ensuite, pour la première fois « encore » il viendra du ciel. Mais parce que l’intention de leur discours portait sur la nature divine, ils comptaient une seconde fois sa venue : la première (fois), (la nature divine) vint du ciel par le moyen de cet homme ; et elle « encore » doit venir dans le même homme assumé, à cause de la conjonction ineffable qui se fit de l’homme avec Dieu.
15. Aussi le bienheureux Paul après avoir dit : « Nous attendons la manifestation de Dieu Très Grand », ajouta-t-il « et Sauveur Jésus-Christ » [17], afin de montrer que nous attendons que la nature divine, qui est au-dessus de tout, vienne et se manifeste à tous les hommes. Puisque la nature divine n’apparaît pas d’une apparence visible, c’est selon la capacité des spectateurs qu’elle se manifeste aux hommes ; mais sous quelle forme attendons-nous que se manifeste la nature divine, il nous le fit savoir en ajoutant : « et Sauveur Jésus-Christ ». Et c’est de cet homme corporel qu’il l’entend ; et manifestement il indique que par la venue de celui-ci et par son apparition, c’est la nature divine qui se manifeste ; qu’en ce même homme, par lequel jadis elle nous a sauvés, de nouveau elle va se montrer pour donner ces biens ineffables. C’est à bon droit donc que nos pères bienheureux firent cette addition. Par cet « encore » ils désignent la nature divine qui donne à celui-là aussi qui apparaît, la grande dignité que ce soit lui qui juge. Car c’est elle qui va juger le monde entier, selon la parole de l’Apôtre, qui dit : « elle jugera la terre entière par l’homme Jésus » [18]. Manifestement, en effet, le bienheureux Paul enseigna que c’est par cet homme assumé pour nous et ressuscité d’entre les morts pour la confirmation de notre foi, que Dieu jugera la terre entière. Mais que suffise à notre instruction aujourd’hui ce qui a été dit, et faisons monter louange à Dieu le Père et au Fils unique et à l’Esprit Saint, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen.
Fin de la septième homélie.